Coup d’État (La reine des esprits, tome 1), par Valérie Simon

17 octobre 2015 par Lodael

Illustration de couverture: Yayashin

Illustration de couverture : Yayashin

Encore une petite chronique d’un bon roman de fantasy aux Éditions du Riez, qui décidément garnissent bien nos étagères. Avec Coup d’État, Valérie Simon nous plonge dans un univers dangereux et lumineux, où les femmes tiennent une place importante. Plus exactement, certaines femmes, les Initiées Denaia, une secte puissante noyautant les plus hautes instances du pouvoir. Leur principe ? Former leurs adeptes à une maîtrise exceptionnelle de leurs corps et de leurs esprits, leur permettant d’exceller dans les arts du combat comme de la séduction. Choisies parmi de très belles jeunes femmes, les Initiées sont ensuite placées par leur hiérarchie sur la route des hommes de pouvoir, qu’elles séduisent afin de contrôler leurs faits et gestes. Maîtresses d’elles-mêmes, dissimulant à la perfection leurs réels objectifs, elles orientent ainsi à leur guise les décisions stratégiques de l’empire, tout en laissant aux hommes l’illusion de diriger. Pourtant, le pouvoir des Initiées n’est pas sans limites, et l’exploitation du Cristal, pierre angulaire de l’économie impériale, leur échappe encore. Pour changer cela, il leur faut intriguer afin de faire tomber dans leur giron le royaume d’Alsybeen, qui tire sa richesse de l’exploitation du Cristal, que des Contrebandiers extraient des fonds marins à leurs risques et périls. Le Cristal, à la densité plus faible que celle de l’air, permet en effet de construire des navires et des vaisseaux volants, de transporter des armées et d’assurer une supériorité militaire à l’empire, mais aussi de créer de magnifiques bâtiments et des œuvres d’art sublimes.

Le roman débute sur le retour d’Alia, l’héritière du royaume d’Alsybeen, dans sa capitale, après dix ans d’exil en formation chez les Initiées Denaia. Elle y a été envoyée par son père alors qu’elle était enfant, dans l’espoir de la protéger après l’assassinat de sa mère. Celle-ci était elle-même une Initiée, tuée pour avoir bravé les directives de sa supérieure en épousant le roi par amour. Alia est donc placée d’emblée dans une position ambiguë, puisqu’elle a toutes les raisons de haïr le Denaia, responsable de la mort de sa mère, tout en étant elle-même une Initiée entraînée, suspectée à ce titre d’agir pour le compte du Denaia. Malgré cette position délicate, elle fait montre d’un fort caractère. Elle n’hésite pas à faire le mur malgré les tentatives d’assassinat plutôt que de rester cloîtrée pour sa sécurité, brave son père et ses généraux, et déploie à plusieurs reprises de ses talents de combattante. Elle se découvre, de plus, un pouvoir effrayant, celui de pouvoir lire les pensées des hommes qu’elle touche. Mais tout cela ne suffira peut-être pas à la sauver ni à sauvegarder son royaume.

Je dois avouer que, malgré une certaine empathie pour tout ce qu’a vécu Alia, j’ai eu du mal à éprouver de la sympathie pour elle. Si j’aime les héroïnes fortes ayant de la personnalité, celle d’Alia m’a parfois agacée par son attitude envers les hommes, qui semblent tous devoir tomber amoureux d’elle. Bien sûr, cela tient à sa formation d’Initiée, experte à séduire les hommes, autant qu’à son statut d’héritière adulée. En revanche, j’ai bien aimé plusieurs personnages masculins du roman, notamment le Contrebandier Bucko Javis, indépendant, intrépide et provocateur, un peu macho pour la façade, que j’imagine semblable à Han Solo dans Star Wars. Dans la galerie variée de personnages, ma préférence va d’ailleurs plutôt à des « bad guys », plus affirmés dans leur caractère que les « gentils » un peu lisses, tels que le prince Haslet ou le soldat chargé de la protection d’Alia. Comme le signalait le début de cette chronique, les femmes tiennent une place de choix dans ce roman, et l’on peut imaginer trouver en filigrane quelques inspirations. Les Initiées Denaia ne sont pas sans évoquer les Aes Sedai de La Roue du temps, ou les Bene Gesserit de Dune. Et, puisque je parlais récemment de Marion Zimmer Bradley, je crois savoir qu’elle est également une source d’inspiration pour Valérie Simon, ce qui ne peut que me plaire.

En résumé, un bon roman dans un univers original, que l’on s’imagine ensoleillé et brillant de Cristal, mais aussi mortellement dangereux, à l’image des créatures reptiliennes que l’on y croise. L’intrigue politique se déroule de façon fluide, et le récit alterne complots, combats et rebondissements inattendus, en livrant le point de vue de différents personnages. Le rythme va crescendo, la tension augmente au fil du récit, jusqu’à son paroxysme dans les derniers chapitres. Le final est très bien mené, et donne une folle envie de lire la suite. Ce premier tome est plein de promesses, et l’on peut s’attendre à une belle saga d’envergure !